Découverte. Après avoir longtemps chanté dans les bars en guitare-voix, le jeune artiste strasbourgeois Arthur Ely, qui cet été a fait sensation sur la grande scène des Francofolies de La Rochelle, sort « En 3 lettres ». Un album où il évoque sans pathos les désillusions de l’existence entre mélancolie, humour, chanson, hip-hop et influences littéraires. A découvrir en live lors de son concert au Théâtre des Étoiles à Paris, le 27 novembre.
Arthur Ely: « J’ai envie qu’on sente l’urgence quand je suis sur scène, où il faut payer de sa peau. C’est presque une question de vie ou de mort. A partir du moment où on fait des chansons, ce n’est pas la planque. »
Arthur Ely a l’art de mélanger les styles avec décontraction et sourire charmeur. Ses chansons parlent du passage de l’adolescence à l’âge adulte et de ses désillusions. Enfant, il voulait devenir champion de tennis, rêve brisé par une grave blessure. Le jeune strasbourgeois troque alors la raquette pour la guitare qu’il travaille comme un fou, casse les codes mêlant chanson et hip-hop porté par « Plus j’avance » et » Libre ». Deux titres que le chanteur, repéré par le Chantier des Francos, a interprété sur la grande scène des Francofolies de La Rochelle en juillet, devant 15 000 personnes, qu’il a aussitôt mises dans sa poche. La marque des grands artistes. Aujourd’hui, il sort son premier album où il se présente « En 3 lettres ». Un registre sensible très groovy dans lequel il s’interroge sans pathos sur son destin entre mélancolie, humour, doute et regard distancié sur la vie, qu’il dévoilera bientôt en tournée avec un concert très attendu au Théâtre des Étoiles à Paris, le 27 novembre.
Quels thèmes abordez-vous dans votre album?
Arthur Ely : Ça parle pas mal des désillusions au sortir de l’adolescence. J’ai 23 ans et j’ai le sentiment tout d’un coup de sortir violemment de l’adolescence. Je me construisais depuis 4 ou 5 ans, avec pas mal d’idées en tête. J’ai dû faire face à un paradoxe. Je pensais qu’en grandissant, je deviendrais plus confiant, mais en fait, j’ai eu l’impression que beaucoup de choses s’écroulaient et que je ne serais plus aussi fort. C’est un peu le passage à l’âge adulte ! (rires). Dans la chanson « Plus j’avance », il y a cette idée que la vie n’apprend pas forcément à être plus sage. Plus tu en sais, plus cela te fragilise, moins tu as confiance. La difficulté est de continuer d’avoir autant envie de bouffer la vie que quand on est adolescent.
Vous chantez « je m’sens libre » sans être heureux pour autant. Comment expliquez-vous ce paradoxe ?
Arthur Ely : Souvent quand on parle de liberté, il y a une idée du bonheur. C’est un concept qui ne me paraît pas si simple. J’ai l’impression qu’on doit tout le temps se construire, que ce soit dans sa vie ou dans la liberté artistique. Ce n’est jamais acquis. On a aussi la possibilité de faire n’importe quoi avec ce destin. Parallèlement à la liberté, il y a un vide à combler et la possibilité de faire de belles choses, avec le risque de l’échec. C’est cela que je trouve un peu effrayant.
Vous avez fait sensation aux Francofolies en juillet en interprétant deux titres devant des milliers de personnes. La scène, c’est une bonne vibration?
Arthur Ely : C’est le moment où tout prend son sens, où je me sens le plus libre et spontané. J’ai fait pas mal de scènes avant de mon lancer dans mon projet. Quand je suis arrivé à Paris il y a quatre ans, j’ai fait deux ans de guitares-voix dans les bars et un peu partout où je pouvais jouer. Souvent, je me retrouvais à chanter devant des gens qui étaient en train de manger des burgers. C’est une période qui m’a donné confiance. Parvenir seul et juste avec sa guitare à emmener dans son univers des gens qui ne sont pas venus vous voir, ce n’est pas évident. Etre sur scène aujourd’hui, c’est presque plus facile finalement! La scène est une sorte de condensé de vie. En 50 minutes, on passe par 50 000 émotions. Il y a des moments où j’ai envie de pleurer, d’autres où j’ai envie de rire. C’est puissant. Le Chantier des Francos , où j’étais en stage cette année, m’a beaucoup appris.
Vous avez une manière originale de casser les codes en mêlant rap, chanson et électro… Comment définiriez-vous votre univers assez inclassable ?
Arthur Ely : En ce moment, je me nourris principalement de rap et de chanson. Là, pour mon projet « En 3 lettres », ce qui m’intéressait, c’était pouvoir d’une chanson à l’autre, reprendre mes premières influences plutôt du rock, façon guitare-voix et juste après avoir quelque chose de plus rap et d’autres moments plus instrumentaux. Je crois que c’est propre aux gens de ma génération où les cultures musicales sont poreuses. Tout est éclaté. C’est aussi la manière dont on écoute la musique avec des playlist où on passe du metal à des chansons super fragiles. La difficulté, c’est de savoir où on va. Ce que j’essaie de faire c’est avoir un fil conducteur dans ma voix, mes textes et y mettre mes tripes et y aller frontalement.
Avant la musique, vous rêviez de devenir champion de tennis. Comment êtes-vous passé de la raquette à la guitare ?
Arthur Ely : J’ai fait du Tennis de 5 ans jusqu’à mes 15 ans. Je me suis blessé au dos et j’ai été immobilisé. Du coup, j’avais pas mal de moments libres. Cela correspond au moment où avec mes potes au lycée, on commençait la musique. C’était le début de la liberté ! (rires). Avec un copain, on a écrit des chansons-rock et j’ai «poncé» la guitare. J’étais obsédé par la gratte, dont je jouais trois heures par jour. Je copiais les solos de Jimi Hendrix, de Django Reinhardt, je pillais tout ce que je pouvais. C’est comme ça que j’ai appris la musique, en autodidacte et de manière instinctive.
Vous allez vous produire en novembre aux Etoiles. Quelles ambiances imaginez-vous pour cette tournée ?
Arthur Ely : Je serai seul sur scène. Cela va être ma première tournée en mon nom. Je vais découvrir qui sont les gens qui aiment ma musique. Cela va être beau, quoiqu’il arrive. J’ai envie qu’on sente l’urgence quand je suis sur scène, où il faut payer de sa peau. C’est presque une question de vie ou de mort. A partir du moment où on fait des chansons, ce n’est pas la planque.
- Album « En 3 lettres » – Label Soixante Sept Mille/Arista. Concert le 27 novembre, Théâtre des Étoiles, 61 rue du Château d’Eau, 75010.
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