Livre. La street artiste Claudie Baudry alias Ma rue par Achbé publie son premier ouvrage. Un beau livre-objet de poésie urbaine regroupant plus de 60 photos de ses mots éphémères écrits à la craie sur les trottoirs de Montmartre.
Le street art de Ma rue par Achbé s’accompagne d’une poésie urbaine qui illumine le regard des passants auxquels ses pensées écrites à même le bitume de Montmartre s’adressent
C’est drôle le pouvoir des mots. Ils nous font rêver, réfléchir, bousculent nos certitudes et nous invitent à prendre de la hauteur, loin du quotidien. Claudie Baudry alias Ma rue par Achbé possède cet art du bon mot qu’elle trace à la craie depuis 2017 sur le pavé de Montmartre, où elle réside. Le bitume est son terrain de jeu favori, comme un grand tableau noir où elle écrit en lettres blanches, ce qui lui passe pas la tête. Son street art s’accompagne d’une poésie urbaine qui illumine le regard des passants auxquels ses pensées calligraphiées sur le pavé s’adressent.
Des messages pertinents à fleur d’humour qui évoquent l’actualité ou l’humeur du moment, que l’on retrouve dans un beau livre-objet qui paraît chez Alternatives/Gallimard. Un ouvrage qui témoigne également de sa vigilance et de son combat pour le droit des femmes. A l’image de son hommage à Simone Veil écrit au lendemain de sa mort : « Simone s’éteint, les femmes restent en Veil » qui a fait le tour des réseaux et l’a révélée au grand public.
Ma rue par Achbé a un don pour trouver les formules qui font mouche, sel de ce recueil où son auteure s’amuse souvent à « tourner la gravité en dérision, comme un défi à la mort« . Des pages où se mêlent art éphémère et photographies prises avec son smartphone pour mieux fixer les choses, mettant en lumière la démarche de l’artiste. Le tout classé par chapitres où les aphorismes d’Achbé abordent les thèmes des héros ordinaires de son quartier (« l’homme le plus fidèle, c’est mon facteur »), du féminisme (« On veut des droits, pas des roses »), de l’air du temps (« Chasse ton stress, chausse tes strasses ») ou de l’amour (« Love for rêver », « Ma bouche d’incendie embrasse tes sens »).
Des mots qui font écho à la mémoire d’Hervé Baudry, son mari dessinateur de presse, tombé sur le trottoir devant chez elle, victime d’une crise cardiaque en 2016, où elle continue de vouloir « craier du bonheur« , comme une forme de dialogue avec l’être aimé disparu. Autant d’haïkus qui prennent vie à même le bitume, à ciel ouvert, jusqu’à ce que la pluie les efface et permette à la street artiste d’inventer d’autres mots pour mieux partager : « Ma rue, mon quartier au sens large, c’est une personne à part entière » explique Claudie Baudry. « Elle est le pilier qui me soutient et nous conduit, mes enfants et moi, sur le chemin de la résilience – c’est une figure éternelle« .
- Ma rue par Achbé – Préface de Carole Martinez. Collection Arts urbains – Alternatives, Gallimard. 66 pages. 15 euros.
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