Exposition. À la Galerie Rastoll, nichée au cœur de Paris, le photographe Christophe Airaud dévoile sa nouvelle exposition, « L’Absence de la peinture » , une série audacieuse et poétique qui interroge le rapport complexe et fécond entre photographie et peinture. A travers ses photos, Airaud ne se contente pas de capturer des images : il dialogue avec l’histoire de l’art, rendant hommage à ces maîtres qui ont influencé son regard, tout en questionnant ce qu’il appelle « la restitution aux peintres de mes inspirations ». Une démarche à la fois humble et ambitieuse.
Christophe Airaud : « Comment rendre peinture mes photographies ? »
C’est la question centrale que pose Christophe Airaud, à la fois comme une provocation et une quête personnelle. Pour lui, la photographie n’est pas qu’un simple outil de reproduction du réel. Elle peut aussi être une traduction visuelle de la peinture, une passerelle entre deux formes d’expression que l’histoire a parfois opposées.
« Tout a commencé en 1827, explique Airaud. Nicéphore Niepce, en capturant cette première image depuis sa maison de Saint-Loup-de-Varennes, a provoqué un bazar. » Un bouleversement qui a poussé les peintres à réagir, et à réinventer leurs codes. Ils ont répondu par l’impressionnisme, l’abstraction, le cubisme, le fauvisme. La peinture s’est échappée des contraintes de la figuration. Aujourd’hui, c’est à son tour de répondre, à travers son objectif, à cette révolte artistique.
Mais loin de chercher à rivaliser avec les peintres, Airaud s’inscrit dans une démarche d’hommage, rappelant au passage ces mots empruntés à Van Gogh : « Je ne fais pas des citations, je fais des traductions. »
Dans l’ombre des maîtres
L’exposition se déploie comme une galerie de références sublimées. On y retrouve l’écho des natures mortes délicates de Chardin , où chaque objet respire un silence presque mystique. On devine dans certains ciels photographiés la lumière changeante et tourmentée de Turner, qui semble toujours sur le point de se dissoudre. Les compositions mélancoliques rappellent l’Amérique silencieuse de Hopper , tandis que les aplats de couleur saturée évoquent l’introspection de Rothko . Et toujours, en filigrane, le souffle romantique de Caspar David Friedrich , avec ses paysages grandioses où l’homme se perd face à l’immensité.
Un dialogue visuel et poétique
Ce qui frappe dans « L’Absence de la peinture », c’est la manière dont le photographe parvient à faire de l’absence une présence. Le titre de l’exposition lui-même sonne comme une énigme, une façon de rendre visible ce qui se cache sous les images : les couleurs, les compositions, les lumières des peintres qui l’ont inspiré.
Et c’est là toute la force de son travail : il ne cherche pas à copier ou à recréer les tableaux. Airaud capte plutôt l’essence , l’atmosphère, l’émotion qui transparaît dans ces chefs-d’œuvre. Il invite le spectateur à redécouvrir la peinture à travers l’objectif, dans un subtil jeu de correspondances.
Avec cette série, il joue sur les textures, les contrastes et les nuances pour donner à ses clichés une quasi profondeur picturale. « L’Absence de la peinture » n’est pas seulement une exposition, c’est une réflexion sur l’art lui-même.
Victor Hache
- Exposition : Christophe Airaud « L’Absence de la peinture« . Du 30 janvier au 22 février 2025, Galerie Rastoll, 16 rue Sainte Anastase, Paris 3è.