george sand

Émancipation, identité, place de la femme dans le couple, combat contre les injustices sociales, l’auteure de « La Mare au diable » a mis à mal le carcan d’une morale rétrograde basée sur l’ignorance. Une femme éprise de liberté dont on retrouve la trajectoire ancrée dans la modernité au travers du livre que lui consacre Ysabelle Lacamp « George Sand. Non aux préjugés » paru chez Acte Sud Junior. 

Rarement le statut d’écrivaine n’aura été porté avec autant de superbe et de convictions. Toute sa vie, elle a rebattu les cartes du masculin/féminin. En 1832, en se rebaptisant George (l’homme de la terre, en latin) Sand, Amantine Lucile Dupin de Francueil rompt la loi du père. Déjà à 11 ans, dans le jardin de la propriété de Nohant, elle s’interroge : qui suis-je ?  Et déjà à sa grand-mère, elle lui rétorque : « Jamais, je ne serai la poupée de bois que vous voulez faire de moi. » Très tôt, en lutte contre les injustices, sa vie ne trouvera un sens à sa détermination d’être femme, dans une société régie par la domination masculine, que dans l’écriture.

Au moment d’entrer en littérature et suite à la gifle reçue par son mari Casimir que George Sand décide de quitter, Ysabelle Lacamp dans « George Sand. Non aux préjugés », change de procédé narratif. Du « elle », elle passe au « tu », elle en fait une amie, nous invite à suivre dans ses pages une trajectoire ancrée dans la modernité à contre-courant des idées primaires : la femme n’aurait d’autre alternative que d’être une épouse et une mère. Elle essuie les insultes des bourgeois d’un revers de la manche de sa redingote portée avec panache, chevauche à califourchon son cheval, se baigne nue dans l’Indre. Il faut aller chercher derrière l’apparence de George Sand s’habillant en homme, l’idée qu’elle se fait  » de l’identité au-delà des genres de tout humain ». Elle aime la vie communautaire passée dans la capitale, « sa vie de garçon « , écrit « Indiana », calquée sur les désillusions d’une épouse insatisfaite, qui éclipse « Notre-Dame-de-Paris », de Victor Hugo.

la maison de george sand
La maison de George Sand à Nohant au cœur du Berry.

Elle ne dépend financièrement de personne, sinon de sa plume, ce qui peut irriter certains hommes, « mais ma chère, faites des enfants, surtout pas des livres », lui intime l’un d’eux. Ses amours, Marie Dorval, Musset, Chopin, sa recherche d’une communion physique et intellectuelle constitueraient-ils un danger pour certains messieurs fragilisés dans leur toute-puissance ? Quand elle revient à Nohant avec sa fille Solange, retrouver son fils Maurice, la nature lui a manqué, mais c’est écrire qui l’aide à respirer. En 1836, elle est hors du mariage, obtient la garde de ses enfants et se réapproprie Nohant. Elle veut intéresser les paysans de son domaine aux nouvelles pratiques agricoles, leur apprend à lire, assiste au procès des canuts soulevés en masse à Lyon ; ils seront déportés.

george sandEn 1848, Louis-Philippe abdique, elle s’engage auprès de Blanqui, Barbès, Arago, en faveur du progrès social et d’une réforme du travail. Revenue à Nohant, c’est un rêve qui s’évanouit,  » comment croire à  une République qui massacre ses prolétaires  » ? Entre euphorie et mélancolie, George Sand a donné à ses désirs créateurs, existentiels et émancipateurs, des remparts inaliénables contre l’ignorance et dérangé les convenances d’une morale archaïque. Une visionnaire.

« George Sand. Non aux préjugés » – Ysabelle Lacamp, Actes Sud junior, 76 p, 9 euros.

 

Ysabelle Lacamp, la bio: 

ysabelle lacampAppartenant à une vieille famille huguenote par son père, l’écrivain et journaliste Max-Olivier Lacamp, et d’origine coréenne par sa mère, Ysabelle Lacamp puise volontiers dans ces doubles racines pour son travail d’auteure. Licenciée de chinois et de coréen de l’université de Londres et de l’Institut des langues orientales à Paris, puis comédienne, elle est l’auteur de nombreux succès tels que Une jeune fille bien comme il faut (Albin Michel, 1991), L’Homme sans fusil (Seuil, 2002), Le Jongleur de nuages (Flammarion, 2008) et plus récemment Ombre parmi les ombres, (Collection Sur le fil, Éditions Bruno Doucey). Dans la collection “Ceux qui ont dit non”, elle est l’auteur de Marie Durand : “Non à l’intolérance religieuse” et George Sand : Non aux préjugés ».

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